On se dit souvent qu’être l’enfant d’une star doit être bien, il y a l’argent, la renommée des parents qui ouvre des portes, tout semble plus facile. Pourtant c’est faux. Et je sais de quoi je parle, je suis la fille unique de Carla Sanders, une ancienne chanteuse de Broadway, tête d’affiche de plusieurs comédies musicales au début des années 80. Je n’évoquerai pas mon père dans ce récit, je considère qu’il m’a juste donné son nom de famille, que je n’ai pas gardé d’ailleurs. Il bossait énormément, pour faire fructifier son agence de publicité et avoir plus de contrats, je le voyais peu au final. Lorsque ma mère est tombée enceinte, elle a arrêté de travailler, puis est tout simplement devenue une maman au foyer. Avoir une fille était un rêve absolu pour elle. Je suis vite devenue sa poupée. Elle passait des heures à me coiffer, à choisir mes vêtements, à changer la décoration de ma chambre pour suivre les tendances imposées par ses magazines préférées. Très tôt, elle m’a inscrite à des cours de danse classique, pour faire comme les autres. Aller à la danse, j’adorais ça. J’étais loin de son emprise, je me faisais des amies, et j’aimais bien mettre les jolis body avec les tutus et les jolis chaussons.
Et puis mon professeur a dit à ma mère que j’avais du talent, que je pourrais devenir professionnelle avec plus d’entrainement, et lui a conseillé une académie qui formait les jeunes filles. J’avais à peine 10 ans. Ma figure maternelle m’y a inscrite illico. J’ai tout de suite détesté cet endroit. J’y trouvais les filles hautaines, les couloirs gris, il n’y avait pas de rires, et surtout, il y avait la pesée chaque semaine. Et j’ai toujours été un peu ronde car très gourmande. Il y avait des normes, et je les dépassais de quelques kilos. Et si on les dépassait, il y avait des punitions. Responsable du nettoyage des salles de classe au lieu de participer à la sortie de la semaine. Évincement du prochain spectacle en cours. Pour éviter tout ça, j’ai finit par manger moins, bannir le chocolat que pourtant j’adorais. Bannir les croissants le matin. Bannir tout plaisir de mon alimentation. Mais mon poids restait encore un peu dessus de celui des autres. Alors j’ai commencé à faire comme ces filles dans les magazines de ma mère, je vomissais un repas sur deux. Je détestais faire ça au début, ça m’écœurait. Puis, c’est devenu une sorte de routine, une sorte de devoir quotidien. Forcément, je suis vite rentrée dans les normes. Et comme j’étais douée, vraiment, je participais à chaque spectacle et j’avais le rôle principal bien plus souvent que mes camarades.
A 18 ans, j’ai été engagée au ballet de New York, la considération suprême pour toute jeune danseuse. Ma mère était si fière de moi. Je ne ressentais plus rien de mon côté, je me sentais juste vide. Mais pour lui faire plaisir, pour réaliser son rêve, je me suis oubliée encore une fois. Et je pourrais encore être là-bas sans cet accident, qui m’a fait ouvrir les yeux. Un mauvais porté, une chute, une cheville fracturée. A l’hôpital, un jeune médecin est venu me voir. M’a demandé si je mangeais assez. Je lui avais expliqué qu’une danseuse devait faire attention à son alimentation pour rester légère. Il m’a expliqué que je souffrais d’anorexie. Que je ne nourrissais plus assez mon corps. Que j’avais fragilisé mes os. Et que ceux de ma cheville se sont cassés pour cette raison. Je n’ai passé que trois jours à l’hôpital, le temps de consolider la fracture des avec vis et de plâtrer le tout. Mais ces quelques jours m’ont fait réfléchir. Je ne me faisais plus plaisir, pour rien, je faisais tout par automatisme. Même la danse était devenue une sorte de fardeau pour moi. Je suis restée à la maison le temps de ma convalescence, le temps de préparer ce que j’avais en tête. Et un soir, en pleine nuit, avec juste deux valises, je suis partie de la maison. Et je suis venue ici, à Santa Clarita où j’avais trouvé un appartement dans mon budget et où j’étais suffisamment loin pour que ma mère ne pense pas à me chercher. J’ai aussi repris le nom de ma grand-mère maternelle, qui m’a aidé à fuir, qui m’a fournir l’argent du billet d’avion et de quoi tenir quelques mois si je ne trouvais pas de travail tout de suite. C’est la seule personne à qui je donne régulièrement des nouvelles. A cause de ma mère, je n'ai eu ni d'enfance correcte, ni de vraie adolescence. Mon premier petit ami, je l'ai eu ici, à Santa Clarita. Et je n'ai même pas réussi à me laisser aller avec lui, ni à être suffisamment à l'aise pour être dans le même lit que lui. Je continue à rester en retard sur beaucoup de choses, mais j'essaye de m'améliorer.
Je vis ici depuis maintenant quatre ans et j’ai retrouvé un équilibre. Je mange presque normalement, même si je serai incapable de manger des croissants à vie je pense, parce que trop gras. J’ai trouvé un travail comme assistante dans une galerie d’art. Et je me suis découvert une nouvelle passion, le théâtre. Je prends des cours du soir, deux fois par semaine. Je ne sais pas si je deviendrai un jour une comédienne, je veux que faire ça reste un plaisir donc je ne me mets aucune pression. Je me laisse juste vivre et j’écoute mes envies.

• Age: 23 ans
• Commentaire: Je suis une méchante fille, j’ai utilisé le crtl+f pour trouver le code
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• Code: Okay pour cette fois ci by Le boss